Canadian Poultry Magazine

Au pays des géants

By André Dumont   

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Entrer dans l’une des fosses à fumier d’une ferme avicole de plus d’un million de pondeuses est une expérience qu’on n’oublie pas. Imaginez : dix rangées de 585 pieds de long de monticules de fumier qui ressemblent à des termitières s’élançant en hauteur.

Je suis au rez-de-chaussée du poulailler No 5 au complexe de Rose Acre Farms de Stuart, en Iowa, à 40 milles à l’ouest de Des Moines. Me voilà sous quelque 220 000 poules, en compagnie d’Andrew Kaldenberg, gérant du complexe et président de l’Iowa Poultry Association, et de Kevin Vinchattle, directeur général de l’association.

Trois des six poulaillers au complexe de Stuart sont construits selon le même concept : les poules sont hébergées sur dix rangées doubles de cinq étages de cages. Pour accéder aux poules des deux étages supérieurs, notamment lors des vérifications pour la mortalité, on utilise un échafaud sur roues.
Les poules de l’étage du bas voient leurs excréments tomber 20 pieds plus bas, directement dans la fosse. Sous les cages des étages deux à cinq se trouve un contreplaqué, lequel est raclé plusieurs fois par jour pour faire tomber le fumier dans la fosse.

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L’édifice fait 100 par 595 pieds. Les deux côtés de la fosse sont ponctués d’immenses ventilateurs. Ceux-ci tirent l’air d’ouvertures latérales dans le plafond, rafraîchissant ainsi les poules avant de servir à sécher le fumier. La fosse est vidée une fois par année, le fumier ayant de bonnes chances de se retrouver dans les champs où sont produits les grains qui composent la ration des poules.

Pour mes hôtes, il n’y a rien d’inhabituel à l’ampleur de ces installations. Rose Acre Farms possède des complexes semblables en Indiana, au Missouri, en Illinois, en Caroline du Nord et en Georgie, certains d’entre eux hébergeant plus de deux millions de pondeuses. L’Iowa est de loin l’état qui produit le plus d’oeufs aux États-Unis, avec des complexes pouvant compter jusqu’à quatre millions de pondeuses.

À Stuart, Rose Acre empaquette environ 750 caisses de 360 oeufs par jour. Le poste de mirage, de tri et d’emballage est d’une capacité de 295 caisses à l’heure (102 600 oeufs par heure!).

Les oeufs des six poulaillers voyagent sur des convoyeurs à bande, puis convergent à leur descente vers la station de lavage. Les oeufs sont ensuite mirés, inspectés, classifiés et empaquetés dans une chaîne en continu sans jamais qu’un employé les touche. « Quand vous achetez les oeufs au magasin, vous êtes le premier être humain à les manipuler », dit Andrew Kaldenberg.

Les oeufs peuvent être séparés et empaquetés simultanément en 12 différents calibres, de l’extra large au petit. Tous sont vendus comme oeufs de table. Très peu d’entre eux sont mis en marché sous la marque Rose Acre Farms. La plupart des oeufs de Stuart partent dans des caisses affichant les marques des clients, qui sont des chaînes de supermarchés ou de dépanneurs.

Le complexe de Stuart embauche 55 travailleurs, dont quelques-uns à temps partiel. Andrew Kaldenberg affirme n’avoir aucune difficulté à trouver suffisamment de travailleurs. Quand les demandes d’emplois se font rares, il affiche les postes disponibles.

Sur leurs demandes d’emploi, les candidats doivent attester qu’ils ont le droit de travailer légallement aux États-Unis. Un grand nombre de ces candidats seront rejetés d’emblée, sur la base de leurs faux documents ou à la suite d’une vérification électronique de leur identité.

Les travailleurs touchent un peu plus que le salaire minimum. « C’est quand même difficile de trouver de bons travailleurs », dit Andrew Kaldenberg. « Le travail ici est agréable », ajoute-t-il en allusion à la propreté et la sécurité des lieux. 

Économie régionale
Même dans une production d’une telle ampleur, des mots comme « entreprise familiale » et « production locale » font partie du vocabulaire.

La famille Rust a démarré une production d’oeufs à grande échelle et fondé Rose Acre Farms dans les années 1930, en Indiana. Aujourd’hui, Lois Rust et ses enfants en sont les administrateurs, chacun étant responsable d’un aspect de l’entreprise, qui possède aussi ses propres couvoirs, élevages de poulettes et meuneries.

La moulée pour le complexe de Stuart provient d’une meunerie de Rose Acre Farms à proximité. « Tout notre maïs est acheté de producteurs locaux, certains livrant leurs grains directement à notre meunerie », dit Andrew Kaldenberg. Une prime est payée pour du maïs de qualité supérieure et les producteurs sont invités à signer des contrats pour livraisons immédiates ou réparties sur une période donnée. 

Les producteurs de grandes cultures de la région sont aussi ceux qui profitent du fumier des poules. Rose Acre le vend en vrac à une coopérative locale, qui la revend aux producteurs dans le cadre de leurs programmes de fertilisation commerciale. « Nous savons où aboutit notre fumier, dit Andrew Kaldenberg. La plupart va chez des producteurs locaux qui nous vendent leur grain. »

Si la moulée et le fumier ne voyagent que dans un rayon de 50 milles, il en est tout autre pour les oeufs. Rose Acre Farms vend partout aux États-Unis, et aussi loin qu’à Hong Kong.

Il y a des économies d’échelle à produire des millions d’oeufs par semaine, mais avec un prix du maïs qui va jusqu’à dépasser les 7 $US le boisseau, une gestion serrée est plus nécessaire que jamais.

« Il n’y a aucun mécanisme de support pour le prix des oeufs, dit Kevin Vinchattle. C’est le marché qui dicte à nos producteurs ce qu’ils touchent pour une douzaine. C’est à eux de produire suffisamment efficacement pour qu’ils arrivent à en tirer un profit. »

« Tous les autres prix ont monté, mais celui des oeufs est le même aujourd’hui qu’il y a 15 ans, fait valoir Andrew Kaldenberg. Pour 1 $, le consommateur obtient toujours 12 oeufs sains, contenant 13 vitamines, des protéines et des minéraux. »

Le mois prochain : Andrew Kaldenberg nous parle de biosécurité et des militants des droits des animaux. Kevin Vinchattle nous donne son point de vue sur le rappel d’oeufs contaminés à la salmonelle sur une autre ferme de l’Iowa l’an dernier.

 L’Iowa, un géant de la production d’oeufs
Avec seulement un peu plus de 80 producteurs, l’Iowa est de loin l’état qui produit le plus d’oeufs aux États-Unis. Ses 57 millions de pondeuses donnent environ 14,25 milliards d’oeufs par année (données du USDA, 2008). C’est plus de deux fois plus de pondeuses que dans tout le Canada et le double du nombre en Ohio, le deuxième état producteur d’oeufs aux États-Unis, après l’Indiana, la Pennsylvanie et la Californie. 

« Si l’Iowa était un pays, nous serions probablement 10e ou 11e au monde », souligne Andrew Kaldenberg, gérant de complexe chez Rose Acre Farms et président de l’Iowa Poultry Association.

Pour produire 15,4 % des oeufs du pays, les producteurs de l’Iowa achètent annuellement 57 millions de boisseaux de maïs et 28,5 millions de boisseaux de soya. La plupart de ces grains proviennent des 23 millions d’acres en culture de l’Iowa ou d’états voisins.

L’industrie des oeufs en Iowa emploie 3000 travailleurs dans les couvoirs, les poulaillers, la classification et l’empaquetage.


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